Cotonou, le 31 juillet 2024
Chères concitoyennes, chers concitoyens,
Demain, nous célébrons le soixante-quatrième anniversaire de l’accession de notre pays à la souveraineté nationale, dans un contexte de fracture régionale, mais également de tensions internationales persistantes.
En 2022, nous indiquions que nous aurions besoin dans les temps difficiles et les moments d’incertitude, de l’élan de patriotisme généré par l’inauguration du monument des Dévoués, de ceux de l’Amazone et du prince Wassangari Bio Guéra, pour affirmer notre attachement au pays, à son identité et à ses valeurs. Il n’a clairement pas été suffisant pour tenir face aux assauts de toutes sortes subis ces derniers mois. Et cela reste préoccupant.
En 2023, attentifs et à certains égards inquiets du basculement du monde et de notre région dans une surenchère géostratégique des puissances globales et émergentes, nous avions recommandé à chaque partie prenante de l’animation de la vie de la Nation de renoncer à toute tentation de facilité trompeuse et de ruse coûteuse. En vain !
Des erreurs d’appréciation et des défauts d’anticipation nous ont été préjudiciables dans la conduite de notre politique étrangère et dans la consolidation de notre sécurité nationale, en raison surtout de l’absence d’une culture de la consultation qui nous aurait permis d’élever davantage de remparts contre les tentatives de remise en cause de tout ce qui nous est absolument cher : la paix, la gouvernance démocratique, l’État de droit et la prospérité économique ; en un mot, notre dignité.
Fort heureusement, le pays a toujours su compter sur ses forces visibles et invisibles, ses femmes et ses hommes acharnés et déterminés qui le tiennent debout face aux vents et aux vagues, pour préserver l’essentiel. En premier, les Forces armées et de sécurité à qui nous tenons à rendre une nouvelle fois, un hommage mérité, en nous inclinant silencieusement et avec humilité devant la Mémoire des vaillants soldats morts pour la Patrie et en saluant le courage de ceux qui nous défendent et veillent sur le pays.
En ces temps troubles de réflexions et de réflexes binaires, simplistes, expéditives, voire agressives qui ne laissent aucune place au débat, à la saine appréciation des situations et de nos intérêts, et parfois, emportés dans une sorte d’hérésie collective, il peut nous arriver de perdre de vue ce à quoi nous aspirons profondément : le bien-être pour tous.
C’est pourquoi, nous devons travailler à transformer la formidable énergie de la jeunesse entreprenante du Bénin en autant d’opportunités de création de richesses, de valorisation des talents et des terroirs, et de contribution à la marche du monde.
Les objectifs de notre Association restent les mêmes : produire et diffuser des savoirs originaux en études stratégiques et de sécurité ; participer aux débats sur les grands enjeux politiques et économiques globaux en apportant une voix béninoise singulière par son indépendance et son ancrage local et pluridisciplinaire ; et contribuer à l’élaboration d’une pensée stratégique fondamentalement béninoise et africaine qui déterminera la conduite des politiques étrangères et de sécurité. Sur ce fondement, elle prendra sa part de devoir dans la formation des jeunes et des professionnels des secteurs public et privé, aux enjeux et perspectives éminemment stratégiques dont l’appréciation nécessite des connaissances diverses, et pas seulement l’émoi, la colère et le désir même justifiés et opportuns.
Le monde ne se porte pas nécessairement mieux. Les fragilités s’accumulent. L’incertitude s’est plus que jamais emparée de tous, partout. Mais nous devons vaincre la fatalité du destin funeste des conflits armés et de l’instabilité qui sèment encore en Afrique et ailleurs, des troubles d’une ampleur et d’une gravité indignes de l’époque des progrès technologiques fulgurants.
La relance du multilatéralisme et de l’intégration régionale et africaine s’impose ! Et elle passe par une réforme audacieuse de ses institutions et la prise en compte des aspirations des peuples à la justice et donc à l’équité.
Particulièrement malmenée par les uns et les autres au gré des agendas personnels et circonstanciels si peu cachés, la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a l’occasion de réformer ses organes, de clarifier et de réajuster ses missions et ambitions à ses moyens d’action et de regagner la confiance des populations de la région. Mais aucune organisation d’intégration régionale n’existe en dehors de la volonté politique et des capacités de ses États membres. Le renforcement de la CEDEAO ne saurait donc se faire sans des réformes internes au sein des pays de la Communauté.
Notre pays doit donner l’impulsion nécessaire à ce vaste chantier de rénovation qui servira de levier pour réaffirmer un leadership africain nouveau au sein de l’Union Africaine, des Nations Unies, et dans les partenariats noués avec les États non Africains.
Nous devons, en effet, résister à toutes formes de « distraction » qui nous éloigneraient de nos priorités et des opportunités que nous pouvons tirer de l’attrait stratégique du continent. Nous ne pouvons plus nous permettre le luxe de remettre à plus tard les investissements et les changements cruciaux à réaliser dans l’éducation, la santé publique, les infrastructures, l’énergie, la production agricole et surtout l’industrialisation.
Il est cependant opportun de souligner les progrès notables enregistrés dans la dématérialisation des procédures administratives, la réforme de l’état civil, l’amélioration progressive du cadre de vie et le rayonnement culturel du Bénin dans le monde.
A l’échéance de Bénin Alafia 2025 l’an prochain, la vision d’un Bénin stable et prospère en 2060 qui sera élaborée, doit nous permettre de nous projeter collectivement vers le centenaire de notre Nation, héritière de royaumes millénaires, de pères fondateurs engagés, de traditions et de valeurs qui donnent sens à notre vivre-ensemble et à notre optimisme fondé sur la fraternité, la justice et le travail.
A toutes et à tous, bon 1er Août, bonne fête nationale !
Les signataires
– M. Habib Aboukhedoud, Commandant de bord à Ethiopian Airlines, Instructeur Moto auprès de la Gendarmerie Nationale Togolaise, Formateur en leadership
– Dr. Célestin-Alexis Agbessi, Médecin-Urgentiste, Assistance Publique Hôpitaux de Paris (APHP), Chercheur
– Dr. Guillaume Attolou-Moumouni, Enseignant-Chercheur à l’Université d’Abomey-Calavi, Président de l’Association Béninoise d’Études Stratégiques et de Sécurité (ABESS)
– M. Yaya Bio Bawa, Conseiller principal de programme à l’Institut International pour la Démocratie et l’Assistance Électorale (IDEA), bureau du Tchad
– Me. Dr. Ben Aymar Binassoua Yehouessi, Avocat au Barreau de Paris
– Dr. Elieth Eyebiyi, Chercheur senior en sociologie anthropologie au LASDEL
– Mme Gwladys Gandaho, Chargée de mission du Médiateur de la République
– Gal (ER) Célestin Améyi Guidimey, Président d’honneur de l’Association Béninoise d’Études Stratégiques et de Sécurité (ABESS)
– Dr. Amandine Gnanguenon, Chercheure et Cheffe du programme Géopolitique à l’Africa Policy Research Institute (APRI)
– Dr. Arnaud Houénou, Enseignant-Chercheur à l’Université d’Abomey-Calavi
– M. Djidenou Steve Kpoton, Juriste Internationaliste, Consultant en gouvernance démocratique
– M. Mouhamed de Miliano, Expert en sécurité internationale
– Dr. Aziz Mossi, Chercheur senior au LASDEL et à GI-TOC (Global Initiative Against Transnational Organised Crime)
– M. Ousmane Orou-Toko, Chef du service de coopération politique du Conseil de l’Entente
– Dr. Oswald Padonou, Enseignant à l’École Nationale Supérieure des Armées (ENSA-Bénin), Professeur invité au Cours d’Études Supérieures de Défense (CESD Côte d’Ivoire)
– M. Kwame Senou, Consultant en relations publiques, Administrateur Général de THOP
– Dr. Gilles Yabi, Fondateur et Président de WATHI Think-Tank
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