Un coup qui ne serait certainement pas sans répercussion sur l’initiative de l’audit du fichier électoral. Dans un communiqué publié hier sur ses canaux digitaux, l’Union Progressiste le Renouveau (UPR) a marqué son désaccord sur le principe de l’audit du fichier électoral porté par le cadre de concertation de l’opposition. Le parti de la Mouvance présidentielle a, en effet, émis quelques réserves légitimes à cette démarche de l’opposition. Dans un premier temps, le parti du baobab a jugé qu’il n’était ni cohérent, ni responsable pour une formation de la majorité présidentielle de soutenir une initiative mettant en doute un dispositif électoral qu’il a politiquement défendu et contribué à bâtir. Selon l’UPR, l’organisation de l’audit, telle qu’elle est envisagée, découle d’une méfiance non partagée par le parti. "Le Cadre de concertation des partis politiques n’a pas associé l’Union progressiste le Renouveau aux discussions qui ont mené à cette initiative", peut-on lire dans le communiqué.
Dans un second temps, l’UPR s’est attaquée au fond de la démarche en rappelant que la notion de “fichier électoral” n’a plus cours dans l’architecture juridique du Bénin. En vertu des lois sur l’identification des personnes physiques et le code électoral, le registre national de l’Agence nationale d’identification des personnes (ANIP) constitue la base unique à partir de laquelle la Liste électorale informatisée (LEI) est extraite.
Pour l’UPR, évoquer un "fichier électoral" reflète un décalage avec la réalité du cadre légal actuel. En outre, la proposition de créer un Comité Politique d’Encadrement (CPE) pour superviser le processus électoral a été jugée inopportune. Le parti estime que l’ANIP, en tant qu’organe purement technique, assure déjà cette mission conformément aux dispositions légales. Malgré ses réserves, l’UPR se dit prête à collaborer avec l’ANIP et les autres parties prenantes dans le respect des lois. "Comme cela a été fait à la veille des législatives de 2023, nous restons disponibles pour contribuer à l’extraction et à la mise à disposition d’une liste électorale fiable pour des élections transparentes et apaisées en 2026", assure le communiqué. En plus, le positionnement de l’UPR pose la question de la méthode adoptée par l’opposition pour engager un dialogue sur la transparence électorale. Tout en légitimant les revendications d’ouverture et de fiabilité, le parti majoritaire au parlement met en garde contre les intrusions ou initiatives non conformes aux cadres existants.
Réserves pertinentes mais suspectes
Au regard de cette position de l’Upr, les réserves à l’initiative de l’audit du fichier électoral sont certes pertinentes mais, pour le citoyen lambda, elles pourraient s’assimiler à une fuite en avant et à une volonté d’entraver la transparence. D’aucuns prendraient cette position du parti comme un caprice d’enfant chéri de la République. Plus loin, il faut remarquer que c’est l’UPR le leader de la mouvance présidentielle, et les autres partis de la même obédience politique pourraient lui emboiter le pas. De quoi donc se demander ce que sera la position du BR, Moele-Bénin et de RN. Quelles que soient les raisons de cette sortie, les interprétations seront diverses dans l’opinion selon qu’on est sympathisant de l’opposition ou de la mouvance. Pour les premiers, la position de l’UPR peut être perçue comme une volonté de tricher et pour les autres, cela suit une logique juridique légitime. De toute évidence, la réaction de l’Upr va nourrir dans les jours à venir, la polémique. Dans la crise post-électorale, un nouveau chapitre vient de s’ouvrir et seuls les politiciens savent si elle se refermera de sitôt.
Communiqué de l’Union Progressiste, le Renouveau (UPR)
A la demande du parti Les Démocrates, transmise par une correspondance en date du 19 novembre 2024 ayant pour objet “demande d’audience” visant à “échanger sur l’audit du fichier électoral, l’Union progressiste le Renouveau a reçu, à son siège, ce 25 novembre 2024, une délégation du Cadre de concertation des partis politiques (CCP).
Abordant l’objet de la demande d’audience, l’Union progressiste le Renouveau a rappelé à ses hôtes :
I – Sur la forme que s’il est légitime voire salutaire dans une société démocratique que les partis et les organisations qui se réclament de l’opposition engagent le débat et réclament des actions visant le contrôle du dispositif d’organisation des élections, c’est à la condition que pour la cohérence et la responsabilité politiques, ils gardent la maîtrise de l’initiative et celle de la mise en œuvre de ces actions. L’Union progressiste le Renouveau, parti de la majorité parlementaire et présidentielle, manquerait à sa responsabilité politique et affecterait celle de l’opposition si elle s’associait, dans son positionnement politique actuel, à une initiative fondée sur un manque de confiance dans le dispositif électoral qu’elle a politiquement défendu et activement recherché. Au demeurant, le “Cadre de concertation des partis politiques” initiateur de la démarche visant à auditer le “fichier électoral” l’a si bien et justement compris qu’il n’a pas associé l’Union progressiste le Renouveau aux discussions desquelles l’initiative fut décidée.
II – Au fond, il convient de préciser en liminaire que l’Union progressiste le Renouveau comprend l’esprit d’ouverture manifesté par le chef de l’État, quand bien même elle note que l’expression “fichier électoral” n’a plus aucune réalité dans l’arsenal juridique et administratif du Bénin.
Il convient par surcroît d’observer que :
1. La demande est en déphasage avec les lois en vigueur au Bénin qui organisent l’établissement de la liste électorale informatisée (LEI).
Les objectifs généraux et spécifiques contenus dans les termes de référence évoquent en effet un fichier électoral alors qu’il n’y a plus au Bénin aucun processus qui permet aux citoyens de s’inscrire sur un fichier électoral. Il est prévu plutôt dans les lois en vigueur un registre national établi à partir des registres communaux obtenus après l’enregistrement de toutes les personnes physiques de nationalité béninoise duquel est extraite une Liste électorale Informatisée provisoire (LEIP) à la veille de chaque année électorale et ensuite la Liste électorale informatisée (LEI).
2. La proposition du Comité Politique d’Encadrement (CPE) est inopportune
Il est proposé par les partis et organisations de l’opposition la création d’un Comité Politique d’Encadrement (CPE). Cette proposition est inopportune en ce que la production de la LEI n’est qu’un pan de la mission de l’ANIP qui est d’abord un organe technique. Conformément aux lois en vigueur notamment la loi N° 2017-08 du 19 juin 2017 portant identification des personnes physiques en République du Bénin et la loi N° 019-43 du 15 novembre 2019 portant code électoral, ‘’ l’ANIP transmet 180 jours avant la date du scrutin la statistique relative à la LEI (estimations des citoyens en âge de voter et sans leurs centres de vote) ; 120 jours avant les élections couplées législatives/communales, l’ANIP procède à l’extraction de la LEIP du registre national (prise en compte des centres de vote). La LEI est transmise à la CENA 60 jours avant le 1er scrutin de l’année électorale après l’avoir publiée pendant 15 jours’’.
La préoccupation des partis regroupés au sein du Cadre de concertation des Partis politiques étant la fiabilité de la liste électorale, toute intrusion dans le processus pour des préoccupations électorales devrait cibler l’étape de l’extraction de la LEIP et de la LEI.
3. L’Union progressiste le Renouveau reste cependant disponible à contribuer aux côtés de l’ANIP et de tous autres acteurs concernés, dans le respect strict du cadre légal établi, comme ce fut le cas à la veille des élections législatives de 2023, à l’extraction et à la mise à disposition de la CENA d’une liste fiable pour des élections transparentes, crédibles et apaisées en 2026.
Fait à Cotonou, le 25 novembre 2024
Le Secrétaire Général
Gérard GBENONCHI
- 28 novembre 2024
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