Nationalité béninoise aux afro-descendants : Le gouvernement répond au député Eric Houndété

20 juin 2024

Le gouvernement représenté par le Garde des sceaux, Ministre de la justice et de la législation, Yvon Détchénou, était au Parlement ce jeudi 20 juin 2024 pour répondre à une question d’actualité du député Eric Louis Camille Houndété au sujet de l’annonce de la nationalité béninoise aux afro-descendants ; annonce faite par le président de la République, Patrice Talon lors de la visite qu’il a effectuée au Brésil du 22 au 26 mai 2024.
(Lire ci-dessous l’intégralité de la réponse du gouvernement à chaque préoccupation du député Eric Houndété)

Question 1
Monsieur le Président de l’Assemblée Nationale,
Honorables députés,

Il est effectif que lors de sa visite officielle au Brésil, le Chef de l’Etat s’est exprimé en annonçant que la République du Bénin, permettrait bientôt aux Brésiliens et à toutes les personnes reconnues Afro-descendants, d’acquérir la nationalité béninoise par reconnaissance.
Premièrement, il convient de préciser que l’annonce faite par le Président de la République s’inscrit dans la droite ligne du projet de loi relative à la reconnaissance de la nationalité béninoise aux Afro-descendants en République du Bénin.
L’Assemblée nationale a en effet été saisie par le décret n°2024-955 du 08 mai 2024 portant transmission à l’Assemblée nationale du projet de loi relative à la reconnaissance de la nationalité béninoise aux Afro-descendants en République du Bénin. Ce projet de loi a été introduit au Parlement en vertu de l’article 57 alinéa 1 de la Constitution, conférant l’initiative parlementaire au Président de la République concurremment avec les membres de l’Assemblée nationale.
Le projet de loi motivé par des considérations historiques et culturelles apparait comme un moyen de rétablir les liens à l’égard des descendants des esclaves africains déportés, avec la terre africaine, dont le Bénin est le socle. En effet, malgré toutes les politiques visant à les dépouiller de leurs identités, les descendants d’esclaves déportés de nos côtes sont restés par l’histoire, les arts, les cultes, la mémoire, dans une réelle quête de leurs origines africaines.
Corrélativement, ils expriment à l’endroit de nos États, le désir de la reconnaissance de leur afro-descendance et leur appartenance aux peuples dont leurs ascendants ont été arrachés.
La naturalisation ne permet pas en l’état de traduire juridiquement ces liens entre les peuples d’origine des victimes de la déportation, de la traite négrière et de l’esclavage et leurs descendants. Elle comporte par ailleurs des effets dont l’octroi ou le bénéfice implique une démarche d’intégration.
En tout état de cause, les motivations de la loi et les dispositions projetées seront discutées par les membres de la représentation nationale, en commission comme en plénière au moment opportun. Celle-ci appréciera alors leur pertinence et pourra, souverainement en délibérer.
Deuxièmement, en application de l’article 54 alinéa 1 de la Constitution béninoise, le Président de la République est le chef du Gouvernement et à ce titre, il détermine et conduit la politique de la Nation.
Dans le cadre de l’exercice de cette prérogative, le Chef de l’Etat met en œuvre la politique générale de l’Etat. Le projet de loi relative à la reconnaissance de la nationalité béninoise aux Afro-descendants en République du Bénin s’inscrit justement dans le cadre de cette politique générale de l’Etat.
C’est ce qui justifie le fait que le Chef de l’Etat se soit exprimé sur la question qui au demeurant n’est pas une annonce fallacieuse, sans fondement mais plutôt une question de politique publique soutenue en bonne et due forme par un projet de loi dont l’Assemblée nationale est déjà saisie depuis le 22 mai 2024.

Question 2
La loi n° 2022-32 du 20 décembre 2022 portant code de la nationalité béninoise détermine, en l’état, les conditions d’attribution et d’acquisition par l’étranger de la qualité de Béninois ainsi que les conditions et les modalités de sa déchéance. Dans les dispositions de la loi en vigueur, la modalité d’attribution de la nationalité par voie de reconnaissance n’existe donc pas. Ces conditions générales et restrictives à l’égard de tous les étrangers méritent d’intégrer les liens historiques, culturelles, affectives et les perspectives d’ouverture à l’égard des Afro-descendants.
C’est le sens de la loi dont le projet est transmis à la Représentation nationale. La politique culturelle et touristique d’envergure que le Bénin a engagée perdrait de sens et de logique si un dispositif pertinent n’est pas mis en place.
Le moment de la discussion du projet de loi en commission comme en plénière de ce texte, sera fixé par l’Assemblée nationale.

Questions 3 et 4
Monsieur le Président, Honorables députés,

Les réponses aux questions visant à connaître les critères ou conditions pour être Afrodescendants et ainsi pouvoir solliciter et obtenir la nationalité béninoise, sont apportées dans le projet de loi dont l’Assemblée nationale a été saisie et dont la discussion se fera en commission et en plénière.
Cependant je peux déjà dire, en prélude à l’étude du projet, que l’on entend par Afrodescendant au sens du projet de loi introduit par le Gouvernement, toute personne qui d’après sa généalogie, a un ascendant africain subsaharien déporté hors du continent africain dans le cadre de la traite des Noirs.
En ce sens, la preuve de l’afro-descendance, est fournie par tous actes d’état civil ou officiel, tous témoignages constatés par acte authentique ou par tout autre moyen technique et scientifique.

Question 5
Notre histoire nous enseigne que les forts et les marchés côtiers tels que le fort de Sao Joao Baptista de Ajudà à Ouidah, étaient des points de départ pour les esclaves destinés aux plantations dans les Amériques, principalement vers les colonies européennes en Amérique du Nord, en Amérique centrale, en Amérique du Sud notamment au Brésil, dans les Caraïbes puis en Europe.
Ce sont dans ces régions géographiques que vivent encore essentiellement, la plupart des descendants d’esclaves provenant de l’Afrique subsaharienne.

Questions 6- 7 et 8
Il est évident que nombreux sont les descendants d’esclaves qui, de nos jours en quête de leur origine, viennent en Afrique.

Notre pays, comme les pays frères concernés par la traite des Noirs, reçoit dans ce cadre de nombreux Afro-descendants et en captent en retour des bénéfices en termes d’enrichissement du patrimoine culturel et de contribution au développement de la Nation perçue comme le commun vouloir de vie commune. D’emblée, l’on ne peut fournir avec exactitude, l’effectif des concernés ayant déjà effectué le voyage sur le Bénin. Cependant, lors des manifestations culturelles organisées par notre pays (fête des religions endogènes – Vodun days), il est aisé de noter l’affluence des Afro descendants en quête de leur origine.
Nous ne disposons par ailleurs pas en l’état de statistiques, ni d’étude formelles sur ceux d’entre eux désirant obtenir la nationalité béninoise.
Tels sont Monsieur le Président de l’Assemblée nationale, Honorables députés, les éléments de réponse que je mets à votre disposition en attendant l’étude du projet de loi en commission et en plénière.

En espérant avoir apporté les clarifications souhaitées, veuillez agréer, Monsieur le Président de l’Assemblée nationale, l’expression déférente de ma plus haute considération.

Yvon DETCHENOU



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