Ils ont eu 48h pour recoller les morceaux. Le moins qu’on puisse dire est qu’ils ont réussi. Les délégués présents à Parakou ce weekend à l’occasion du premier congrès ordinaire du parti les Démocrates ont fini par accorder leurs voix. Les travaux qui ont duré une bonne partie de la nuit du samedi au dimanche se sont achevés en début d’après-midi avec l’annonce du renouvellement des instances dirigeantes du parti. Eric Houndété qui a eu l’honneur de prendre les rênes de ce rassemblement politique né dans la douleur au lendemain des législatives de 2019, est appelé à céder son siège au leader charismatique du groupe, Boni Yayi. Ce dernier passe désormais du grade de président d’honneur à président « exécutif ». Qu’est-ce qui a bien pu pousser Boni Yayi qui jouit d’une retraite confortable et paisible, à opter à nouveau pour l’animation de la vie politique en tant qu’acteur de premier plan ? Quelles sont les raisons de la disgrâce de Eric Houndété ? Quelles perspectives s’offrent désormais à ce groupe politique ?
Houndété, l’opposant mou
Visiblement, si le choix porté sur Eric Houndété pour prendre la tête du parti a été bien perçu au départ par les militants, ces derniers ont commencé à être mitigés à son propos avec le temps. Après le clash avec la Force cauris pour un Bénin émergent (Fcbe), beaucoup espéraient une opposition plus structurée et nettement offensive pour faire face aux deux grands blocs qui soutiennent les actions du chef de l’Etat. Il faut croire que Houndété n’a pas été à la hauteur de cette attente. La plupart le trouvaient peu stratège et il donnait l’impression de se rebiffer quand il fallait être ferme sur certains sujets. Il n’en fallait pas plus pour que d’aucuns soupçonnent une collusion entre lui et le chef de l’Exécutif. Comme si cela ne suffisait pas, l’harmonie n’a jamais régné entre Houndété et Atchadé, les deux premiers responsables du parti. Au lieu d’unir leurs forces, ils ont passé le clair de leur temps à se contredire et à se tirer entre les pattes. Cette ambiance explosive n’était pas du goût des militants qui ne juraient que par l’unité de leur parti. Le congrès de Parakou leur a offert l’occasion de rebattre les cartes.
Yayi, leader et sponsor
A ce jour, Boni Yayi reste le leader charismatique incontesté de ce groupe politique. A lui tout seul, il est capable de faire pencher le vote des électeurs en faveur du parti et il l’a prouvé du Nord au Sud. Mieux, il prend une part active aux dépenses du parti. C’est donc tout à fait normal qu’il veuille avoir tous les leviers du parti en main afin de ne pas subir, une seconde fois, sa mésaventure avec Paul Hounkpè. Ce dernier ne s’était pas gêné pour obtenir le récépissé du parti Fcbe en son nom et a confiné Boni Yayi dans le rôle de président d’honneur. Une posture plutôt inconfortable pour l’ex chef de l’Etat qui n’avait aucun pouvoir de décision et subissait les événements. Après cette gifle magistrale, et au vu des reproches faits à Houndété, il a tôt fait de renoncer à un titre honorifique pour s’affirmer désormais comme le décideur en chef. En effet, la charte des partis politiques donne des pouvoirs assez étendus au chef de parti. A ce poste, Yayi désignera en harmonie avec les autres membres du bureau les candidats à la présidentielle, aux législatives et aux communales de 2026. Il ne sera plus un guide qui donne des orientations. Il dirige et prend les décisions phares. Et lorsqu’on connait son degré d’adversité pour le régime en place et son ambition d’œuvrer pour l’alternance au sommet de l’Etat, on comprend aisément que les congressistes de Parakou n’ont voulu prendre aucun risque quant à 2026. Après avoir perdu la Fcbe, Yayi se repositionne avec les Démocrates, un parti qu’il a contribué à révéler sur l’échiquier politique national lors des législatives du 08 janvier 2023 au point d’effacer son ancien parti de la liste des formations politiques qui comptent.
Sa posture actuelle a l’avantage de clarifier le jeu. Personne ne pourra à présent soupçonner l’opposition de dealer avec le pouvoir, à moins que Yayi veuille se dédire. Les deux camps adverses combattront sur le terrain, chacun avec des arguments de taille. Au final, l’un des deux l’emportera. Ce qui est sûr, c’est que Boni Yayi dans son nouveau rôle de chef de parti, s’inscrira désormais dans une logique républicaine et non d’affrontement des institutions souveraines comme ce fut le cas en 2019.
- 14 octobre 2024
- 11 octobre 2024