Rosaline Ahounou est une jeune femme au foyer, elle est professeure certifiée d’anglais, exerçant au Collège d’enseignement général (CEG) Malanhoui dans la Commune d’Adjarra. Malgré ses occupations familiales et professionnelles, elle consacre du temps à la lutte contre les violences basées sur le genre, à la promotion de la gent féminine à travers la formation, et à la protection de l’environnement et de la biodiversité. Tout ceci grâce à l’ONG Better Friendship in Actions (BeFri-Actions) dont elle est la Directrice Exécutive. Dans un entretien accordé à votre journal, Rosaline Ahounou revient sur la genèse de son engagement citoyen et les actions menées jusqu’à présent par son ONG.
Vous êtes la Directrice Exécutive (D.E) de l’ONG Better Friendship in Actions (BeFri-Actions). Parlez-nous un peu de votre ONG
Tout a commencé en 2005 par un déclic après mon souci permanent d’accompagner les jeunes filles élèves dans les établissements scolaires où j’intervenais en tant qu’enseignant vacataire et où j’ai vraiment été témoin de leurs peines. Et quand je me réfère à l’enfance et à l’adolescence difficiles que j’ai eues, l’instinct d’appuyer ces filles à travers des conseils pratiques et partages d’expériences m’a poussé à agir. A un moment donné, des parents de jeunes filles passaient me voir à l’école ou m’invitaient dans leur domicile pour me remercier des changements positifs qu’ils ont observés au niveau de leurs enfants. Ces parents souhaitaient même que j’aille au-delà des écoles où j’enseignais. C’est ainsi qu’en 2018, j’ai présidé l’Association Correspondance-Culture (ACC) créée par madame Reine OUSSOU qui appréciait mon combat. malheureusement, les textes de cette association limitant mes ambitions et sous la bénédiction de madame Reine Oussou, j’ai fondé BETTER FRIENDSHIP IN ACTIONS (BeFri-Actions) entendez Meilleures Amitiés en Action, une Organisation Non Gouvernementale dont je suis la Directrice Exécutive.
Quels sont les domaines dans lesquels votre ONG intervient ?
Nous intervenons dans les domaines de l’éducation, la santé communautaire, la santé sexuelle et reproductive, la protection de l’environnement et de la biodiversité, la promotion des droits humains, la lutte contre les violences basées sur le genre. Pour la petite information, selon WANEP-BENIN, au Bénin, 53% des élèves du primaire et du secondaire ont déclaré avoir été témoins ou ont subi des attouchements inappropriés, des pressions ou des blagues à connotation sexuelle. Aussi, 43% des élèves du secondaire et 80% du primaire disent-ils avoir connu des filles qui ont abandonné l’école en raison de violence sexiste et 80% des filles interrogées disent connaitre des élèves qui ont été approchés par des enseignants pour obtenir des faveurs sexuelles. Le même rapport indique que 77% des filles pensent que les enseignants de leurs écoles ont des relations sexuelles avec des élèves. De plus, en 2018, selon l’Enquête Démographique et de Santé (EDSBV) du Bénin, 18% des femmes âgées de 15 à 49 ans ont déclaré avoir subi des violences physiques ou sexuelles au cours des 12 mois précédents. Ces chiffres confirment que le phénomène existe bel et bien dans notre pays et qu’il faut travailler à l’éradiquer.
Restons un peu sur la situation des violences basées sur le genre. La situation est-elle si alarmante ?
Pour répondre à votre question, est-ce que vous savez qu’il y a des cas de femmes enceinte battues à mort par leurs conjoints ou des fillettes qui tombent enceinte après avoir été violées par des prédateurs sexuels ? La situation est gravissime et eu égard aux conséquences fâcheuses de ces actes aussi bien sur les victimes que sur les personnes qui les entourent, aucune action ne sera de trop pour maintenir la veille. Nous remercions au passage le gouvernement de notre pays qui a pris la situation à bras le corps en créant l’Institut national de la femme qui fait un travail formidable.
Que dites-vous aux populations quand vous les rencontrez lors de vos séances de sensibilisation ? Est-ce qu’elles savent qu’il existe une juridiction, la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (CRIET) qui condamne régulièrement des prédateurs sexuels ?
En ce qui concerne la CRIET au sujet de la lutte contre les Violences Basées sur le Genre (VBG), je puis dire sans me tromper que la criminalisation des infractions à raison du sexe s’est amplifiée ces derniers temps. Les décisions de la CRIET après les procès pour les cas de violences faîtes aux femmes et aux filles viennent à point nommé. Cela nous permet de mieux sensibiliser les populations sur les risques qu’elles courent si certains continuent de s’adonner à ces actes déplorables. La femme n’est pas un objet pour qu’on en dispose comme on veut allant jusqu’à détruire la vie d’innocentes âmes.
Vous luttez contre les violences basées sur le genre et vous intervenez aussi dans d’autres domaines. Comment arrivez-vous à tout concilier pour être efficace.
Tout est lié dans ce monde. Il n’y a pas de bien-être social sans un environnement sain et une bonne éducation. A titre Illustratif, en ce qui concerne nos actions pour la protection de l’environnement et de la biodiversité, nous serons à notre quatrième édition de plantation d’arbres le 1er Juin prochain. Notre particularité après avoir mis en terre les plants c’est le suivi à travers une organisation des personnes qui vivent dans les milieux que nous viabilisons pour l’entretien. En rencontrant des gens pour leur parler de l’environnement, nous sommes sûrs d’avoir de bons partenaires pour relayer les informations que nous apportons dans les autres domaines de nos activités. Dans le même ordre d’idées, nous avons postulé au ‘’Global School Program’’ du ‘’Sustainable Development Network’’, une activité qui s’inscrit dans l’Agenda 2030 des Nations Unies pour l’implémentation des Objectifs de Développement Durable. Grace à ces nouvelles compétences que nous avons acquises, nous sommes désormais mieux aguerris pour impacter très positivement non seulement divers compartiments de notre société mais aussi agir de façon à lutter pour un environnement plus vivable. On entend souvent dire que seul l’on va vite mais pour aller loin, il faut se mettre en groupe. Et conscients du fait qu’aujourd’hui, nul ne peut réussir dans une autarcie ou dans une zone de confort, nous avons noué des partenariats avec des structures aussi bien étatiques que privées. Nous avons gagné la confiance de la Commission Nationale Béninoise pour l’UNESCO. Nous avons de très bonnes relations avec le ministère des enseignements maternel et primaire et le ministère des enseignements secondaire, technique et de la formation professionnelle qui ont compris la pertinence de notre lutte. Nous postulons également à des projets lancés par diverses structures et organisations.
Quels retours avez-vous de ces différentes actions ? Est-ce que vous avez l’impression que ces actions impactent positivement les communautés ?
Nous pouvons dire sans nous tromper que nous avons repêché des centaines de filles de la perdition. En d’autres termes, grâce à nos diverses activités, des parents des filles bénéficiaires de nos activités ne cachent pas leur enthousiasme suite aux changements positifs qu’ils constatent dans la vie de leurs enfants. Idem au niveau des femmes que nous formons pour les activités génératrices de revenus. Nous croyons en ce que nous faisons et c’est cela qui nous motive à poursuivre nos actions.
Votre mot de la fin
Je voudrais profiter de cette opportunité pour remercier mon époux, mes enfants, les membres de l’ONG BETTER FRIENDSHIPS IN ACTIONS, mes collègues et tous ceux qui de près ou de loin ont cru et continuent de croire en notre mission tout en partageant notre vision. Nous sommes davantage ouverts pour toute idée de fédération d’efforts pour l’atteinte de nos objectifs.
Propos recueillis par Karim Oscar ANONRIN
- 14 octobre 2024
- 14 octobre 2024