Jean Djissouclounon au sujet de la récurrence des cas de suicide : « Il faut que la solidarité soit de mise pour que nous puissions ensemble conjurer ce mal qui gangrène notre société »

13 juin 2024

Le suicide dans la société peut être endigué par la solidarité et les soutiens de tous genres. Le sociologue Jean Djissouclounon fait des propositions pour endiguer le phénomène devenu récurrent.

En cette année 2024, plusieurs cas de suicide ont été rapportés. Cette situation s’est aggravée ces deux derniers mois. Comment appréciez-vous le phénomène ?
Le suicide est un fait social et la recrudescence de ce fait, inquiète beaucoup la société. D’abord le suicide, c’est se donner intentionnellement la mort et cela peut s’expliquer par plusieurs raisons. Le suicide est un fait social récurrent dans notre société et la recrudescence de ce fait, inquiète beaucoup la société. L’homme n’agit pas librement mais son comportement dépend d’un contexte social. Et parlant du suicide d’un AME, il faut dire que c’est un aspirant au métier d’enseignant qui vit certainement dans des conditions qui ne sont pas réjouissantes. Ça peut être une dépression pathologique. Partant de là, nous pouvons parler des différents types de suicides. Nous avons le suicide fataliste, le suicide égoïste, le suicide atomique et le suicide altruiste donc sur ce, logiquement le suicide a sa cause dans la société.

Quelles sont les causes du suicide ?
En ce qui concerne la cause du suicide, nous pouvons dire qu’elles sont multiples et multiformes. D’abord, parlant du suicide, c’est d’abord un acte individuel donc une pathologie. Ça peut être sur le plan de la santé avec les troubles mentaux, le stress psychologique, des maladies psychiatriques graves notamment les troubles du nerf, les maladies bipolaires, l’abus de substance surtout l’alcoolisme. Vous voyez, tout récemment l’Etat a pris une décision pour interdire l’importation, la vente des boissons en sachet plastique ; on doit en arriver même à interdire la consommation de l’alcool. La prise des stupéfiants peut pousser au suicide et de là, nous allons parler des causes sociales parce que l’individu dans son comportement, dépend de son groupe social vu que la société est indispensable pour lui. Et tout évolue dans la société. Imaginons que l’individu a déjà des antécédents familiaux, des difficultés. Si nous prenons le cas de l’AME, d’abord son déploiement pose problème car il est amené à quitter sa famille, aller vivre ailleurs avec des conditions que nous connaissons aujourd’hui. Ce qui pourrait l’amener à se donner délibérément la mort. Loin de ses parents, le salaire qui n’arrive pas à couvrir le mois, les charges familiales, la perte significative dans la vie d’une personne, la solitude ; tout ça constitue des facteurs pouvant contribuer à la dépression d’un AME entrainant ainsi l’envie de se suicider.

En tant que sociologue, est-ce que vous recevez souvent de ces personnes qui ont envisagé de se suicider ?
Nous recevons des gens qui envisagent de se suicider chaque jour que Dieu fait parce que frappés par la vie, ils se disent être maudits. C’est le cas par exemple d’un ancien dans la corporation qui, à l’âge de 40 ans, n’a pas encore de relation stable et sa copine sur qui il comptait est décédée tragiquement. Donc pour lui, la vie ne vaut plus la peine d’être vécue. Le fait de se confier à quelqu’un, partager son chagrin avec la société contribue à surpasser le désespoir. Je tiens à notifier que chaque jour, nous traitons de ces cas et nous essayons d’aider psychologiquement, en travaillant sur le mental de ces derniers afin de les ramener à de meilleurs sentiments.

Quelles solutions pouvez-vous alors proposer pour mettre fin à ce phénomène ?
Parlant de solutions, nous savons que le suicide est un fait qui est généralisé et qui prend de l’ampleur. Ainsi, nous recommandons que le social se règle par le social puisque l’homme fait partie intégrante de la société. Et déjà, il faut que nous commencions à sensibiliser la société à travers la religion, la famille, les partis politiques pour que tous ensemble, nous puissions arrêter cet acte ignoble. Les leaders religieux et politico administratifs doivent se soutenir mutuellement pour redonner de l’espoir à ces gens afin de les amener à sortir de la solitude. Il est nécessaire que les acteurs sociaux les soutiennent moralement, psychologiquement et financièrement pour que ce phénomène soit endigué de notre société.
En conclusion, il faut donc dire que le suicide est un fait social, ça se manifeste par la pathologie et des conditions sociales. Il faut que les acteurs sociaux notamment la religion, renforcent beaucoup plus l’amour, l’éducation qui est son rôle également et que la solidarité soit de mise pour que nous puissions ensemble conjurer ce mal qui gangrène notre société.
Propos recueillis par Antoinette KOYA (stag)



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