La rentrée solennelle 2023-2024 du Barreau du Bénin a eu lieu ce vendredi 22 décembre 2023, au Tribunal de Cotonou. Placée sous le thème : « L’aide juridictionnelle : une exigence du procès équitable », la cérémonie d’ouverture a réuni les acteurs venus du Togo, des anciens Bâtonniers, des représentants de la Cour suprême et de la Cour constitutionnelle.
Contribution financière de l’Etat aux frais de justice des personnes aux revenus modestes, l’aide juridictionnelle représente la garantie pour les personnes à faible revenu d’avoir droit à un procès équitable. Elle est assurée par l’Etat qui, de plus en plus, se montre malheureusement défaillant. En choisissant de réfléchir sur le thème : « L’aide juridictionnelle : une exigence du procès équitable », le Barreau du Bénin entend attirer l’attention des pouvoirs publics sur la responsabilité qui est la leur de garantir un procès équitable aux personnes démunies en prenant en charge les frais liés à la mise à disposition de ces personnes en conflit avec la loi, d’un avocat.
Dans son mot de bienvenue, le représentant du comité d’organisation, Me Michel Ahoumènou a laissé entendre que la présente rentrée est non seulement pour inaugurer une nouvelle année judiciaire mais aussi pour renouveler l’engagement des avocats envers la primauté du droit et la protection des droits de l’homme. « En tant qu’avocat, nous sommes les sentinelles des droits et des libertés et notre rôle est essentiel pour assurer l’intégrité du système judiciaire », a-t-il souligné.
Parti de l’état des lieux pour aboutir au lien entre l’aide juridictionnelle et le procès équitable, Innocent Avognon, représentant le 1er président de la Cour suprême, a laissé entendre qu’en matière d’aide juridictionnelle, garantie d’un procès équitable, le Bénin est loin des standards internationaux. Toute chose qui, selon lui, devrait amener à faire évoluer la législation et les pratiques en vigueur.
Pour le Bâtonnier Me Angelo Hounkpatin, l’indigence du justiciable en toute matière et particulièrement en matière criminelle peut durablement sceller son sort. Après une définition des notions d’aide juridictionnelle et de procès équitable, le Bâtonnier en exercice trouve que le mécanisme de l’aide juridictionnelle ou d’assistance judiciaire au Bénin peut permettre aux justiciables qui n’en ont pas les moyens de pouvoir payer les frais de procédures mais également de bénéficier des services d’un avocat. Seulement, il constate que dans la pratique, ce mécanisme est très mal organisé et réduit à sa portion congrue qu’est la matière pénale avec spécialement un intérêt marqué pour les cours d’assises désormais supprimées par les récentes réformes de 2018 au profit des juridictions de droit commun ou d’exception statuant en matière criminelle. Dans ce cas, qu’advient-il alors des justiciables démunis et vulnérables à raison de leur âge ou de leur sexe et incapables de s’offrir les services d’un avocat pour assurer au mieux la défense de leurs intérêts en justice, se demande Me Angelo Hounkpatin.
Me Robert Dossou : « Le barreaux organise des visites, des consultations juridiques… »
Pour l’ancien Bâtonnier Me Robert Dossou, le Barreau du Bénin fait le maximum qu’il peut pour assister la veuve et l’orphelin. « Le barreaux organise des visites, des consultations juridiques et surtout le Bâtonnier en exercice désigne des avocats qui vont plaider gratuitement pour les justiciables n’ayant pas les moyens de se payer un avocat. C’est une tâche traditionnelle, classique coutumière et très noble que le Barreau accomplit. Le Barreau le fait également par ses démembrements que sont l’Union des jeunes avocats ou l’Union des femmes avocates du Bénin. Tout cela concourt à assurer la dignité de celui qui est poursuivi en justice », laisse-t-il entendre. Toutefois, le Barreau a besoin de l’assistance de l’Etat, souligne Me Robert Dossou. « Il faut que les commissions d’office, les aides judiciaires soient budgétisées pour encourager les avocats dans leur mission comme cela se fait partout dans le monde. Un budget doit alimenter pour améliorer notre service dans l’intérêt des justiciables et dans l’intérêt d’un bon fonctionnement de la justice ».
Me Kanmanpene Ladanmin, Barreau du Togo
« …c’est l’aide juridictionnelle qui rétablit l’équilibre entre les citoyens parce que, imaginez-vous qu’un citoyen démuni soit traîné dans les juridictions sans aucune assistance. Non seulement il est condamné par la nature pour l’indigence qui l’assaille mais aussi il est condamné par l’Etat qui doit assurer à chacun l’égalité. Pour rétablir l’équilibre, les citoyens ont besoin de cette aide. Elle peut être appelée aide universelle dans la mesure où dans les démocraties, tout est fait pour que chacun ait ce minimum pour la justice. Il faut que ce thème soit renouvelé toutes les fois jusqu’à ce que nous ayons cette assistance comme un rappel à nos dirigeants. Ce n’est pas seulement ceux qui ont les moyens qui doivent bénéficier de la justice. Chez nous aussi, bien que les textes existent, l’aide tarde à se mettre en place. Notre pays a pris cette mesure en votant un texte mais jusque-là on n’a pas l’aide juridictionnelle dans les faits. Nous sommes ici pour le même combat. Le combat pour l’aide juridictionnelle est un combat pour les barreaux frères ».
- 14 octobre 2024
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