Pascal Atoukou alias Pacheco, est humoriste béninois, créateur de contenus web. Deux fois déjà, il a représenté le Bénin au ‘’Parlement du rire’’. Dans cet entretien, il parle de l’humour béninois, de ses expériences et de ses projets.
On entend parler de Pacheco, celui qui a révélé le Bénin au ‘’Parlement du rire’’ deux fois déjà. Comment est-ce que Pacheco a croisé l’humour sur son chemin ?
Je n’ai pas croisé l’humour. On est plutôt jumeaux. Je suis né et l’humour est né en même temps. Plus sérieusement, contrairement aux autres qui disent que c’est parce que leur papa était artiste qu’ils le sont, ce n’est pas le cas chez moi. C’est vrai que mon papa est assez drôle mais je ne pense pas que c’est pour cela que je suis aussi drôle. Je pense plutôt qu’à un moment donné, j’avais senti le besoin de me lancer dedans et je m’y suis lancé simplement et voilà, le résultat est là.
Comment cela s’est-il passé jusque-là ?
Le chemin est vraiment long. Même le dire ainsi peut laisser croire qu’actuellement, je suis déjà arrivé au bout du tunnel. Nous sommes encore sur le chemin. On essaie encore de construire quelque chose d’assez solide. Il reste encore à faire. On préfère dire qu’on a fait du chemin. On est fier de cela. Nous continuerons encore de nous battre. On n’est pas totalement satisfait mais on est fier de ce qu’on a accompli comme je viens de le souligner.
Quels sont les moments qui ont marqué le parcours de Pacheco ?
Ce qui m’a le plus marqué et qui a retenu mon attention, c’est ma présence sur des réseaux sociaux. La création des contenus m’a permis vraiment d’agrandir ma communauté et de me faire découvrir en tant que stand-upper parce qu’au départ, j’ai été au parlement deux fois mais personne ne me connaissait. A un moment donné, je me suis dit : « mais attends, à aucun événement, on ne m’invite. On invite seulement ceux qu’on voit sur les réseaux sociaux. Si je vais là-bas, les gens pourront m’inviter ». Ainsi, je pourrai me vendre en tant que stand-upper. Je pense que l’un des moments marquants, c’est déjà cela, cette présence sur le web. Après, il y a les autres spectacles sur lesquels j’ai fait acte de présence comme par exemple avec celui-ci à l’Institut français qui indubitablement a enrichi davantage mon carnet d’adresses et mon curriculum vitæ.
Que réservez-vous souvent au public lors des spectacles ?
Le rire. je ne peux pas leur donner de l’argent. Ce n’est que le rire parce que là, je peux leur promettre qu’ils vont rigoler. Ceux qui ont eu la chance d’assister à un de nos spectacles peuvent déjà faire le rapport aux autres. J’ai déjà une petite expérience dans le domaine et je ne pense pas que les gens vont au spectacle et repartent mécontents. Cela est impossible. Tout ceux qui vont venir, vont gagner leur soirée.
Quels sont les projets de Pacheco ?
Lorsque je me suis rendu compte qu’il n’y avait pas de scène sur laquelle nous pouvons produire, j’ai créé ‘’Pacheco Comedy Club’’ et la nouvelle saison est prévue pour cette année. Cela sera une représentation de chaque mois. On a déjà fait le premier numéro le 20 janvier dernier. Le prochain sera pour le 23 février et ainsi de suite. Donc chaque mois, il y aura une scène et l’idée, c’est d’offrir cette scène à tous ceux qui ont de Stand-up pour qu’ils puissent se produire et développer leur routine d’écriture. La routine, c’est d’écrire des textes fréquemment parce que s’ils n’écrivent pas, ils vont passer à côté. Puisque c’est en forgeant qu’on devient forgeron. Donc, c’est ce que cette scène va leur permettre de réaliser. Et en dehors de ‘’Pacheco Comedy Club’’, nous travaillons aussi de plus en plus dans les entreprises pour apporter le rire aux gens parce qu’aujourd’hui, on se rend compte de ce que cela représente. Par exemple, cela permet de maîtriser le stress dans les entreprises y compris l’absence de cohésion au sein des équipes. Nous avons un projet dénommé ‘’Rire à la porte de l’entreprise’’ que nous leur proposons. Il va permettre aux agents de passer des moments ensemble et les aider à moins gérer le stress et à renforcer la cohésion au sein de l’équipe. Après cela, il y a des amis avec qui je travaille. Ce sont des collègues qui sont en train de produire leur One man show. Le 20 Avril sera le One man show de Hermano et beaucoup d’autres choses que nous prévoyons pour cette nouvelle année sans oublier notamment l’ensemble des web séries que nous avons en vue. Nous avons déjà proposé aux boîtes de la place, ce que nous-mêmes, nous proposons à nos abonnés pour les maintenir. C’est juste pour leur servir ce que nous savons faire et qui fait de nous des artistes humoristes.
Comment voyez-vous l’humour béninois d’alors et celui d’aujourd’hui dont vous êtes l’un des ambassadeurs ?
Je pense que ceux-là ont balisé le chemin. Il faut leur dire merci à vie parce que s’ils n’avaient pas pris le risque de le faire, ce n’est pas certain que nous ayons l’envie de leur emboîter le pas. Aujourd’hui, on peut affirmer avec fierté qu’on a une nouvelle méthode de faire la chose mais c’est toujours le rire. Ils sont des humoristes à part entière. C’est pour cela que dans presque tous nos spectacles, on a toujours un moment pour leur rendre gloire. La dernière fois, j’étais avec Mr Edabôr et Kromozom et on a rendu un hommage à Tonton J. Nous reconnaissons ce qu’ils ont fait parce que c’est eux qui ont ouvert la voie. Sans eux, nous ne sommes absolument rien, nous ne pouvons pas clamer que nous sommes meilleurs. Ce n’est pas le même type d’humour. Ils ont fait l’humour populaire que le peuple béninois a adopté. Aujourd’hui, nous proposons le stand-up au même peuple béninois. Cela a pris du temps avant d’être apprécié comme ce qu’eux, ils ont fait. Pour cela, on ne peut pas balayer du revers de la main ce qu’ils ont fait. C’est d’abord eux que nous célébrons à travers nos talents. Ils sont la fondation et le socle. Pour tout humoriste d’aujourd’hui, y compris dans le stand-up, ils sont les faiseurs de rire béninois et les architectes. Nous leur devons le respect et la considération à vie.
Quel message pouvez-vous adresser à la jeune génération qui nourrit l’envie de faire comme vous ?
Je suis encore de la jeune génération. Toutefois, pour ceux qui veulent devenir humoriste, je vais leur dire que le marché est porteur. Il y a de la place pour tout le monde mais surtout pour ceux qui ont le talent et qui veulent vraiment se mettre à la tâche avec abnégation et résilience. Ce n’est pas une coopération pour se distraire. Ceux qui viennent avec cette intention vont passer à côté. Donc dans ce secteur, je peux dire à tous ceux qui ont envie de le faire, qu’il y a des possibilités de se faire de l’argent, de payer le loyer, de manger à sa faim et de réussir sa vie. Seulement qu’il faut beaucoup d’abnégation et beaucoup de résilience. C’est très important de le souligner.
Un secteur qui requiert l’abnégation et la résilience n’est certainement pas facile qu’on le pense. Quel appel pouvez-vous lancer à l’endroit des autorités pour que la chose porte mieux ?
Je pense déjà que les autorités font ce qu’elles peuvent. Il y a déjà quelques années, il n’y avait pas du tout des scènes organisées par le gouvernement sur lesquelles les humoristes peuvent se produire. Aujourd’hui il y a chaque année, des activités artistiques à Cotonou et il y a une scène dédiée exclusivement au Stand-up. Donc, c’est déjà un grand effort. « L’artiste demande toujours », dit-on. Alors, qu’il y ait beaucoup plus d’initiatives pour nous donner la chance de produire, de montrer ce Bénin qu’ils veulent révéler. Qu’ils ne cessent d’accompagner les initiatives et moi je tenais vraiment à dire merci à ces autorités qui nous soutiennent mais aussi aux peuples béninois parce que quoiqu’on dise, c’est ce peuple qui se déplace pour assister aux spectacles. Si tu organises, tu as la salle, la lumière, les artistes sont là et personne ne vient, tu ne seras pas heureux. Chez nous, c’est le spectacle vivant et le rire est interactif. Du coup, la satisfaction est immédiate car nous, on ne sort pas des singles. Ceux qui se déplacent, ils sont notre dieu et je remercie beaucoup le peuple et je l’invite vivement à continuer de venir nous soutenir. Nous leur faisons la promesse de continuer à travailler ardemment pour toujours être à la hauteur de leurs attentes.
Réalisation : Fidégnon HOUEDOHOUN
- 2 octobre 2024
- 1er octobre 2024